Preuve

Ce qui est affirmé sans preuve peut être nié sans preuve Euclide

L'absence de preuve n'est pas la preuve de l'absence Martin Rees, astrophysicien britannique

Rares sont ceux qui, dans la plupart des domaines, ne préfèrent pas la certitude au doute, mais plus rares encore sont ceux qui l'obtiennent Guillen, Michael : "La logique et la preuve - Un trésor de certitude", Invitation aux Mathématiques, p. 17

Niveaux

  1. Niveau de preuve élevé
    • Consensus scientifique
    • Méta-analyses d’essais comparatifs randomisés
  2. Présomption scientifique
    • Essais comparatifs randomisés de faible puissance
    • Études de cohorte
  3. Niveau de preuve faible
    • Études cas-témoins
    • Études comparatives comportant des biais importants
    • Études rétrospectives
    • Série de cas
  4. Indices ne relevant pas de la preuve
    • Parole d’expert·e (reconnu·e dans son domaine d’expertise)
    • Anecdote personnelle, témoignage rapporté
    • Rumeur, “bon sens”, sagesse populaire, croyance, opinion
s1Les niveaux de preuve – Questions animalistes s2Méthodes #1 « Ce n’est qu’une théorie » : les différents niveaux de preuve – Ce n'est qu'une théorie

La charge de la preuve

Selon la méthode scientifique communément admise, la charge de la preuve (burden of proof) revient à l'auteur d'une affirmation non encore prouvée. Sans une telle preuve, la science continuera à considérer ses hypothèses et théories comme valides. À cet état de fait, certains partisans d'une théorie non prouvée pourront répondre que l'absence de preuve n'est pas la preuve de l'absence, ce qui est tout à fait vrai et pas incompatible avec la réservation du jugement du scepticisme qui se garde d'affirmer l'inexistence de quelque chose. Une telle affirmation, typique du rationalisme, est en outre indémontrable. Elle est juste supposée vraie au travers d'une croyance soutenue par un réductionnisme fort contestable. Un réductionnisme identique à celui utilisé par les partisans d'une existence par défaut (c.-à-d. si vous ne me prouvez pas que ça n'existe pas, c'est que je suis fondé à croire que ça existe). Toute affirmation, négative comme positive, est sujette à des vérifications légitimes (observation validant la prédiction d'une théorie typiquement).

Principe d'économie

Le rasoir d'Ockham (souvent mal orthographié Occam) est fréquemment invoqué pour satisfaire un principe de parcimonie : les entités existantes, selon ce principe, ne doivent pas être multipliées plus qu'il n'est nécessaire. Cela signifie que l'on donnera préférence à la plus petite théorie possible, avec le moins d'objets possibles dans le modèle attendu, et le moins d'hypothèses ad hoc possibles.

Le principe de parcimonie est en fait plus catégorique que l'idée d'origine émise par Ockham, qui ne l'émettait que toutes choses étant égales par ailleurs (comparer ce qui est comparable, qui produit les mêmes résultats par exemple). Dans la même veine, il existe le rasoir d'Hanlon, qui dit N'attribuez jamais à la malice ce qui peut être expliqué de façon adéquate par la stupidité).

Cependant, ce principe, s'il est intéressant, n'est pas une règle absolue, comme le rappelle Philip MorrisonPhilip Morrison : C'est un critère puq>t économique ; ce n'est pas le seul guide pour la science — ce n'est en aucune manière un guide sûr pour la science. C'est simplement un guide, mais je le trouve assez intéressant s3Morrison, P. : "The Nature of Scientific Proof: A Summary", Symposium de l'AAAS sur les ovnis, 26-27 décembre 1969, Boston (Massachussetts). Edité dans SaganCarl Sagan-Thornthon Page 1972, pp. 276-290. Pour MorrisonPhilip Morrison le témoin doit être considéré comme un instrument complexe, avec ses avantages et ses inconvénients comme les autres, et ce qui compte avant tout est de prendre en compte correctement l'ensemble des liens reliant le phénomène observé à la mesure.

Le cas critique

Il est souvent imaginé que pour prouver quelque chose, il suffit d'un cas indubitable. Même les sceptiques, à l'instar des plus fervents croyants, prétendent qu'un fragment de corps extraterrestre, un bout de vaisseau spatial, ou même une soucoupe atterrissant Place de la Concorde devant des caméras télévisées pourraient suffire à installer un consensus.

Cette idée est probablement entretenue par l'histoire de l'acceptation des météorites, suite à une chute de météores sur le village de L'Aigle, au début du siècle. Il ne faut pas faire dire à cette histoire ce qu'elle ne dit pas. Les scientifiques de l'époque n'ont pas du jour au lendemain changé d'avis suite à cet événement. Jean-Baptiste Biot, en allant étudier le phénomène sur place, en récoltant d'autres éléments, a simplement fait de la bonne science, et a finit par convaincre. C'est ce que rappelle Marcello TruzziMarcello Truzzi dans son texte ses réflexions sur la réception des déclarations non conventionnelles en science : Bien trop souvent en parapsychologie les gens parlent comme si des déclarations cryptoscientifiques étaient faites, comme si une seule expérience critique pouvait la prouver. C'est ridicule du point de vue scientifique. L'histoire et la philosophie des sciences a montré qu'il n'existe pas d'expérience critique. Une seule expérience ne change pas le corps de la science. Des reproductions et des changements de théorie doivent suivre, et peut-être la vision du monde dans son ensemble doit changer.

Ainsi, un cas, aussi extraordinaire fut-il, ne constitue généralement pas la preuve d'une généralité. Un bout de corps extraterrestre, de soucoupe, un film... seraient faute de toute reproductibilité (un 2ᵉ, 3ᵉ corps, ou bout de soucoupe, etc.) simplement qualifiés d'inconnus, de "non expliqués". Probablement même, proposerait-on des explications improbables à leur sujet.

Des preuves extraordinaires

Avant que David HumeDavid Hume dise que des déclarations extraordinaires demandent des preuves extraordinaires et que Carl SaganCarl Sagan la reprenne, Laplace lui-même avait posé le principe selon lequel l'importance de la preuve doit être proportionnée à l'importance de l'allégation.

Jusqu'à preuve du contraire

En science, aucune vérité n'est jamais gravée dans le marbre. Il suffit d'éléments contradictoires vérifiables pour la remettre en cause :

Je dirais que le concept "preuve" fait partie des plus mal compris de la science. Il a une définition technique (une démonstration logique que certaines conclusions découlent de certaines suppositions) qui est totalement décalé avec la manière dont il est utilisé dans la conversation courante, qui est plus proche de juste "un élément très solide en faveur de quelque chose"."

Il y a une différence entre la manière dont les scientifiques parlent et ce que les gens entendent parce que les scientifiques ont tendance à avoir la définition la plus stricte à l'esprit. Et selon cette définition, la science ne prouve jamais rien ! Donc lorsqu'on nous demande Quelle est votre preuve que nous avons évolué à partir d'autres espèces ? ou Pouvez-vous vraiment prouver que le changement climatique est provoqué par l'activité humaine ? nous avons tendance à bafouiller et simplement dire "Bien sûr qu'on peut."

Le fait que la science ne prouve jamais rien, mais crée simplement des théories du monde de plus en plus fiables et complètes qui restent néanmoins sujettes à des révisions et améliorations, est un des aspects-clés de la science qui fait son succès. s4Sean Carroll

Le fait qu'une théorie puisse être vraie jusqu'à être éventuellement invalidée ne justifie donc pas que n'importe quelle théorie soit acceptable, puisque celle-ci doit offrir le moyen d'être testée.

s5"Qu'est-ce que le rasoir d'Occam ?" s6Williams, Clare: "La question de la collaboration scientifique", INUFOR Digest, 1997-07 s7Guérin, PierrePierre Guérin: "Le problème de la preuve en ufologie", in Bourret, Jean-Claude Le Nouveau défi des ovnis, Paris, France-Empire, 1976 s8Sagan, C.: The Cosmic Connection. Garden City, New York, Doubleday, 1973